Antonia Siliberti - Coiffeuse
Antonia Siliberti, l’ancienne coiffeuse de Madame Peyo sur Bruxelles, est débauchée par Dorothée au début des années 90. Elle se souvient de son arrivée à Paris.
« Madame Peyo, qui était l’une de mes clientes, a dit à Dorothée : « Appelez ma coiffeuse » C’est ce qu’elle a fait et je suis allée la coiffer pour son concert. Avec Dorothée, ça s’est très bien passé. J’ai rencontré Jean Luc Azoulay qui m’a débauché en me proposant de venir à Paris pour m’occuper de Dorothée. Je dis toujours ça à mes amis : je suis arrivé à Paris grâce aux Schtroumpfs !
Que ce soit avec Do, Pat le Guen ou Azoulay, le fait que je sois venue de Bruxelles et que j’arrivais à Paris faisait un peu de moi la pette protégée de qui on s’occupe pour ne pas qu’elle se perde dans Paris. C’est vrai que, même quand Dorothée bossait et que moi je ne bossais pas parce qu’elle était en interview ou en post-synchro, elle me disait « Va te balader avec maman. Elle connaît bien Paris » Sa maman me faisait visiter et découvrir la capitale française. Je l’ai bien connue.
Pendant quatre ans, Dorothée et moi étions tout le temps ensemble, on travaillait tout le temps, et beaucoup. Pendant tous les voyages, je l’ai accompagnée quasiment de 1992 1996, pendant tous ses concerts, pendant toutes les émissions. Il n’y en pas une où je n’étais pas là.
En quatre ans, je n’ai pas eu un mot plus haut que l’autre avec elle. C‘est un bonheur, en fait, de travailler avec elle. Ce qui est génial, avec Dorothée, c’est qu’elle est entière. Soit elle aime bien, soit elle n’aime pas. Mais ce qu’elle n’aime surtout pas, ce sont les gens qui lui cirent les pompes, surtout à l’époque, qui vont dire « oui, oui… ce que tu portes c’est magnifique », alors que ça lui va comme un sac. Parfois elle arrivait dans la loge et je lui disais « Mais qu’est-ce que c’est que ce truc que tu portes ? C’est moche. Ca ne te va pas du tout » Elle adorait ça. Du coup, elle me demandait aussi mon avis sur les fringues qu’elle portait. Elle a toujours bien aimé ma franchise et elle aime bien les gens qui sont professionnelles. Elle aime les gens courageux et travailleurs. Elle n’apprécie pas, par contre, les gens qui se plaignent tout le temps, ça la gonfle. Mais quand elle doit en supporter, elle les supporte. Elle a travaillé avec certain autour d’elle, mais elle ne le disait pas et encaissait.
Le premier voyage que j’ai fait avec Dorothée, c’était La Guyane. C’est l’un des concerts que j’ai préféré. On était dans une salle où je devais laver les cheveux de Dorothée au tuyau d’arrosage dans le jardin, à l’eau froide. Elle ne se plaignait pas, ne disait rien et le faisait alors que d’autres auraient fait un scandale.
Ce soir-là, elle jouait dans une salle où les sièges étaient en bois. Tous les enfants se sont mis à frapper sur les sièges en même temps et ça faisait une sorte de percussion absolument magnifique. J’ai adoré cette première tournée avec elle, parce que je n’avais jamais voyagé dans ces endroits-là.
Le plus sympa, c’est quand on partait à l’extérieur, pour les tournages. C’était vraiment cool. A chaque fois, on arrivait et je déposais ses fringues sur le lit. Je préparais toutes ses petites affaires. En fait, je n’avais pas grand-chose comme boulot. Je l’appelais le matin et je lui disais « Dorothée, je fais tes cheveux ? » et elle répondait « Oh non. Va nager, te balader, te reposer. Je me fais une queue de cheval. » Et elle me disait « Pour ma suite, si tu veux la partager, pas de problème. Profites-en. Il y a les clés à la réception.
Quand on allait dans les îles, elle me disait « Tu t’es mis de la crème ? Non tu n’as pas mis de crème, aller je vais t’en mettre ». Il y en a d’autres qui veulent toujours qu’on s’occupe d’eux, qui sont très possessifs, vous prennent beaucoup d’énergie, vous parlent mal et ne vous laissent pas respirer…. Dorothée n’était pas comme ça. Elle ne m’étouffait pas.
Avant de monter sur scène, elle était morte de trouille. Je pense qu’elle y a pris goût mais à chaque fois, c’était une épreuve. A chaque concert, elle flippait de la même manière. Il n’y a pas une seule fois où je l’ai vue détendue avant de monter sur scène. Elle était sous tension. Mais je crois que pas mal d’artistes sont comme ça. Après, évidemment, elle était contente de l’avoir fait. Elle avait ce soulagement. Ouf, c’était fini. Elle y était arrivée et elle était fière d’elle parce qu’elle était arrivée à surmonter sa peur.
Un truc lui est arrivé et l’a vraiment fait flipper pendant la série de concerts de Bercy en 1992, c’est lorsque cette éléphante est montée sur scène, elle a reculé alors que Dorothée était derrière, coincée entre un mur et elle. Elle a failli l’écraser et Dorothée a bien cru y rester. Malgré tout, elle est remontée sur scène. A l’époque, je ne faisais pas partie de l’équipe mais do me l’a raconté…
En arrivant, quand on rentrait dans sa loge, je préparais son maquillage, que j’étalais devant elle et je savais qu’à ce moment-là, il ne fallait pas lui parler. Je lui faisais son petit shampoing, les cheveux, je préparais toute sa loge avec tout ce qu’il fallait à l’intérieur, et je ressortais sans faire de bruit. Alors, je la laissais tranquille et elle se maquillait toute seule parce qu’elle aimait ça.
Avant de monter sur scène, ou avant d’aller sur le plateau, il y avait un truc qu’elle faisait tout le temps, c’était s’asperger de son eau de toilette. Je l’ai encore dans le nez, son parfum. A Paris, c’était plutôt « Eau » de rochas et, en tournée, surtout quand c’était dans un pays chaud, c’était l’eau dynamisante de Clarius. C’était vraiment ses trucs
Plus tard, avec son habilleuse, on venait l’aider à s’habiller avant de lui lancer un gros « good luck » et de lui laisser un dernier moment de tranquillité. Avant les concerts, on ne se parlait quasiment pas. Il y avait un vrai silence. Elle était trop nerveuse. Elle ne pouvait pas se déconcentrer. Juste avant d’entrer en scène, elle allait voir ses musiciens et ses choristes.
Lorsque l’on était en tournée, après le show, elle venait toujours voir les gens pour les remercier, passait dans les loges de chacun pour savoir si tout allait bien, si personne ne manquait de rien. Alors qu’elle signait volontiers des autographes, il y a parfois des parents qui étaient vraiment violents avec elle, qui la poussaient. Je me souviens un jour, qu’une femme lui a carrément tiré les cheveux pour la faire venir signer un autographe pour sa fille. Les gens la bousculaient, alors que ce n’était pas une armoire à glace. Il y a une fois où elle s’est sentie un peu oppressée. Elle m’a dit que les enfants étaient toujours sympa, mais que c’étaient les parents qui l’agressaient.
Le concert terminé, elle m’offrait des fleurs, quand elle en avait trop, ou des boîtes de chocolat puis on faisait la fête, au restaurant. Avec Dorothée, on rigolait, à table. Elle, elle mangeait peu. Comme la télé grossit, il fallait garder la ligne mais, de toute façon, comme elle n’arrêtait pas de bosser, elle n’arrivait pas à manger. Elle grignotait comme une petite souris. Je lui préparais des assiettes avec un tout petit bout de chaque chose. Je savais ce qu’elle aimait, ce qu’elle n’aimait pas, sa manière de manger… Ce n’était pas la peine de lui servir une énorme assiette, juste des petits bouts de choses différentes.
Elle aimait faire la cuisine. Je sais qu’elle adore les jus de mandarine pressées. Elle adore également le café. En fait, Dorothée n’est pas très difficile, mais c’est juste dans l’ambiance « Menu dégustation »… Je n’ai jamais vu Dorothée se prendre une grosse entrée, un gros plat et un gros dessert. Elle aimait bien le fromage et n’était pas trop friande de nourriture sucrée A un moment donné, elle avait une passion pour les crumbles, mais en fait elle aimait surtout les faire et pas trop en manger.
Avec moi, elle a toujours été gentille, toujours aux petits soins Il n’y a pas très longtemps, je suis allé chez elle pour m’occuper de sa couleur Et elle m’a dit qu’il y avait toujours mon petit « Coca zéro » dans le frigo, comme chaque fois qu’elle sait que je viens. Elle prépare des toasts à grignoter, des petits gâteaux… C’est une vraie petite maman en fait ! »
Extrait de "Dorothée : Merci pour la récré" - Editions de la Lagune - 2008