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Chantal Goya et Dorothée : les deux copines préférées des enfants

Le lot républicain – 10 décembre 1983

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Leurs mimiques de grandes sœurs, leurs battements de main faussement improvisés, leur répertoire gentillet, leur valent des montagnes de railleries, de jalousie, d'ironie. La Vosgienne, Chantal Goya et l'ex-présentatrice du petit écran, Dorothée, n'en demeurent pas moins les copines préférées des enfants.

Devenir star du disque pour enfants. Statue, statut peu glorieux au demeurant pour des débutants de la scène. Bâtir des chansons qui endorment les chérubins, travailler à des couplets provoquant automatiquement les risettes, guère compatible, il est vrai, avec des rêves de nouveau Brel ou de fils spirituel de Ferré.
Pourtant, pas question de faire avaler n'importe quoi à la clientèle enfantine. Un vague conte à la sauce berceuse ne suffit plus aujourd'hui ; pas davantage qu'une aventure mal ficelée sur fond sonore de comptine. D'abord, parce qu'au même titre que le mot, la note appartient désormais à l'univers familier des plus petits, qui préfèrent jouer avec un mange-disques qu'avec une pile de cubes, qui constituent les premières cibles d'une avalanche audiovisuelle, qui adorent, encore et toujours, les jolies histoires et les personnages enchanteurs.
Ensuite parce que ce marché disco- graphique bien particulier, a pu éviter la marginalisation. Et a su, au contraire, jouer à fond les atouts de la qualité.


Héros du petit écran
Ce terme de qualité passera évidemment pour un affront, ou un reflet criard de nullité crasseuse, aux yeux, aux oreilles en la circonstance, de ceux qui ne peuvent supporter plus de trois minutes les gamineries de grande sœur Chantal » ou les sourires de « cousine Dorothée ». Oubliant par là-même qu'ils ne leur sont pas destinés...
Reste qu'il suffit de comparer les disques proposés aux gamins de 1982 aux enregistrements du début des années soixante-dix pour constater, impartialement, une évolution considérable de ce marché.
Consolation pour les héraults de l'écrit, la mode actuelle se veut, nettement, au livre-disque. Des textes attractifs, savamment imagés, parfois complétés de jeux (charades, coloriages, rébus et découpages) permettent aux bambins d'apprendre tout en s'amusant. Le rôle didactique du microsillon, les parents ou éducateurs - principalement en maternelle – ne songent plus à le nier. Certains déplorent, en revanche, la part trop belle faite aux héros du petit écran. Mais si Maya l'abeille, Goldorak, Nono, Ulysse 31, Capitaine Flam, Casimir, Boubi le petit ourson, Heidi, Candy... ont la part belle, à qui la faute ?
Les adultes-acheteurs ont tout de même l'embarras du choix face au rayon de disques enfantins. Et si, jugé par certains sociologues trop moralisateurs, voire manichéens, le monde de Walt Disney les irrite, si les personnages de Mary Poppins, Pinocchio, Blanche-Neige, Aladin, Peter Pan, Cendrillon, Bambi, Rox et Rouky, Bernard et Bianca... leur paraissent trop fades ou manipulateurs » (!) pour de petites oreilles, demeurent à la devanture une foule de contes (le plus souvent servis par le talent des comédiens renommés, de Fernandel à Jean-Claude Brialy, en passant par Marie-Christine Barrault ou... la princesse Grace de Monaco) et une série d'enregistrements purement, volontairement didactiques : initiation à la musique, approche de la vie et des oeuvres des grands compositeurs Prokofiev et son « Pierre et le Loup » bénéficiant en la circonstance d'un maximum de faveurs.


10 millions d'unités
Et puis, il faut compter également avec des chansons faites sur mesure pour les gosses. Celles de Jean-Jacques Debout, destinées à sa femme Chantal Goya, celles de Dorothée qui marche pratiquement sur ses plates-bandes, celles d'Evelyne Leclerq qui doit se dire qu'après tout, il y a place au hit-parade de l'enfance pour deux ex-présentatrices du petit écran.

Mais aussi, moins typiquement enfantines, pas nécessairement reliées à des produits de consommation intensive (héros de dessin animé principalement), en un mot moins « commerciales », les œuvres intéressantes d'Anne Sylvestre ou Henri Dès. Sans parler d'Imbert et Moreau qui entonnent, un tantinet opportunistes, « Super, les nouveaux parents ».
Evidemment, le matraquage publicitaire et les moyens colossaux des héritiers de Disney ont tendance à donner une idée fausse de ce marché particulier, mais non à part. Aux consommateurs d'apprendre à fouiller dans les bacs des disquaires. A s'interroger sur la pérennité des héros de la plus belle tradition (Zorro, David Crocket) face au déluge télévisuel, sur la valeur comparée du Petit Prince ou de Maya !
Les industriels du disque, eux garderont de toute façon le sourire. Bon an, mal an, la vente du microsillon enfantin dépasse la bagatelle des dix millions d'unités. A peine la moitié du marché classique, quasiment autant que la musique dite d'ambiance, davantage que le jazz...
Et Noel 82 ne renversera pas la vapeur. Nous tenons les paris.


Pascal CHIPOT

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