Dorothée joue la comédie
TV Magazine - Décembre 1991
Dix-neuf ans de télé et une allure de petite fille. Mais, pour Noël, Dorothée chante pour les grands: elle a préparé un « Cadeau de Noël » (le 24 décembre, TF1, 20 h 50), une comédie musicale bourrée de chanteurs-Roch Voisine, Nana Mouskouri, etc. et d'animateurs maison - Sabatier, Foucault... venus faire un tour en amis. Rencontre sur le tournage-marathon, bouclé juste avant que la chanteuse n'entame ses répétitions pour Bercy 1992 (à partir du 18 janvier). Mais comment autant d'énergie tient-elle dans un format poids plume?
Une fille en rouge au fond d'une baignoire blanche. Dans un décor surréaliste – danseuses déguisées en lavabos et pingouins dégoulinant de sueur sous les spots-, Dorothée tourne un bout de son « Cadeau de Noël ». Quel métier! Lagaf", venu chanter son fameux « Bo, le lavabo », la pousse sans ménagement dans une baignoire. Deux fois, trois fois. Coupez! Changement de décor. Dorothée se relève en grimaçant et en se frottant les coudes. Elle se pose sur une chaise et attend sagement les questions. On dirait vraiment une petite fille, silhouette gracile, robe rouge et baguettes de tambour bien peignées. «C'est simple, dans ma tête j'ai exactement le même âge que les enfants pour lesquels je chante! Lance-t-elle en riant. C'est drôle, d'ailleurs, parce que je fais de la télé depuis... mon Dieu, dix-neuf ans déjà, mais je ne triche pas je m'amuse toujours à faire ce métier ! » Ça a pourtant très mal démarré: Dorothée (qui n'est encore que Frédérique), déguisée en Chinoise pour la fête de l'école, a oublié tout son texte. Pétrifiée sur scène, les larmes aux yeux, elle a 6 ans et c'est la honte de sa vie. Aujourd'hui, après Bercy et des tournées au bout du monde, elle s'en souvient encore! « Et j'ai toujours le trac. Toujours la peur de rater, de ne pas plaire... »
Dorothée est un drôle de numéro. A la fois sincère et inquiète, assurant qu'elle a « une vie tout à fait normale » et égrenant un emploi du temps de ministre. Ayant co-édifié une véritable usine, AB Productions, qui produit disques, émissions, shows, magazine. Mais affirmant n'avoir aucune notion d'argent : « Je ne sais même pas combien je gagne... » Adorant « la famille, les enfants », mais n'ayant pas encore trouvé le temps d'en avoir: « Je vous dirais bien que je ne vois pas plus loin que le bout de mon nez, s'il n'était si
long! Je ne planifie rien de ma vie, les enfants non plus. J'en aurai, c'est sûr, je n'imagine pas de vieillir sans... Sa vie semble lisse comme une porcelaine, et la productrice du «Club Dorothée» aux programmes décriés - certains l'appellent même le « Club des ratés « -
n'a pas d'états d'âme : « Ecoutez, tous nos dessins animés sont vus par une psy. Mais lorsqu'on a voulu enlever « Ken le Survivant », jugé trop violent, ce fut une véritable révolte ! Les enfants nous ont inondés de lettres. » Elle n'en démord pas, on peut faire confiance aux petits: «Ils savent dire «j'aime, je n’aime pas, j'aimerais ». D'ailleurs, on leur propose des extraits et ils composent eux-mêmes leurs programmes. »
LE PETIT SOLDAT DOROTHEE
Dorothée vit sa vie comme un grand rêve éveillé, enchaînant succès et surprises avec le même étonnement : « Quand on m'a proposé de chanter en Chine, je n'y ai pas cru un quart de seconde ! Je pensais: ils ne te connaissent pas, tu ne parles pas la langue... Et ça a été le coup de foudre! Terriblement touchant... » Les Chinois conquis, l'ont appelée « Grâce et parfum ». Et aussi « La vitalité blonde qui file dans les étoiles », avoue-t-elle en rougissant. Notre Dorothée nationale plaît aussi aux Anglais elle a tourné une série franco-britannique genre « Muppets show », avec des marionnettes-chats. « C'était rigolo comme tout. » La pause est finie. Dorothée se laisse repoudrer, recoiffer. Elle est là jusqu'à minuit. Demain, lever à l'aube une nouvelle journée de tournage non-stop. Le petit soldat Dorothée, bien remonté, repart à l'attaque. « J'ai une vie tout à fait normale, tout à fait normale... »
Cécile Bonzon
De haut en bas, Dorothée en compagnie de l'équipe de « Tournez manège », de Jacky, d'Alain Gillot Pétré et de Carlos, et en duo avec Henri Salvador.