Dorothée : "J'ai la tête dans les étoiles"
Quel avenir Magazine - Mars 1996
-Pendant quelques années, Mme Soleil a participé à vos émissions. Cette collaboration vous a-t-elle développé le goût de la voyance et de l’astrologie ?
- J’ai été très versée là-dedans il y a un moment, mais je m’en suis éloignée et, aujourd’hui, je n’y connais plus grand chose. Je vous avouerai que toutes les sciences occultes et parapsychologiques m’intriguent énormément et m’amusent en même temps. Mais mes connaissances en la matière ne me permettent pas de dire que j’y crois énormément.
-Vous vous intéressez cependant à l’astrologie ?
-Ce ne sont pas les prédictions que cette science permet d’établir qui me fascinent, mais les similitudes que peuvent avoir les personnes de même signe. Je me rends compte à quel point les caractères et les personnalités de 2 Cancer, Balance ou autres se ressemblent. Toutefois, même si j’émets quelques réserves quant à la fiabilité des prédictions, je dois reconnaître que Mme Soleil disait souvent des choses étonnantes.
-Pensez-vous que la voyance directe ou le tarot soient plus fiables que l’astrologie en matière de prédictions ?
-Je ne suis pas très bien placée pour être aussi affirmative, mais je m’étais amusée à apprendre le tarot et, à un moment donné, j’ai pris peur parce que je voyais des choses qui se révélaient exactes. J’ai arrêté ensuite.
- Vous arrive-t-il aujourd’hui de consulter des voyants ?
- Non. A l’époque où Mme Soleil faisait partie de notre équipe, nous parlions beaucoup toutes les deux. Aujourd’hui, je n’en consulte pas parce que, pour tout vous avouer, je crois que j’en ai peur. Je n’ai pas envie de savoir ce qu’il va m’arriver, sinon, je risque de ne plus penser qu’à ça.
- Ne suffit-il pas, au contraire, de se convaincre du pouvoir de notre volonté pour agir sur les évènements ?
- Non, ce n’est pas dans ma mentalité. Je préfère agir au moment où je dois le faire, quitte à prendre les mauvais chemins ou à faire des choix qui ne sont pas des plus judicieux. Mais je refuse de savoir, de préméditer.
- En ce qui vous concerne, avez-vous pris votre destin là où il vous attendait ?
- Pas vraiment… Je ne m’imaginais pas faire un métier qui soit lié avec le show-business puisque je voulais faire du tourisme. Tout a démarré l’année de mon bac, en 1974. Je m’étais amusée à monter Un caprice de Musset en spectacle de fin d’année. La pièce fut présentée au concours inter-lycées et arriva en finale. Un des membres du jury me proposa alors de faire de la télévision et dès que j’ai commencé, et je ne l’ai plus quittée. En fait, elle m’a piégée.
- Vous êtes satisfaite aujourd’hui du chemin que la vie vous a fait emprunter ?
- Il est de toute façon inutile de regretter quoi que ce soit puisque je ne peux pas revenir en arrière.
- Voulez-vous dire par là que vous ne vous penchez jamais sur votre passé ?
- Oh ! Ne croyez pas cela. Je suis au contraire une farouche conservatrice du passé. J’avais plein de choses auxquelles je m’étais attachée. Le signe du Cancer est très conservateur. Même quand ce n’est pas particulièrement beau, je ne peux pas me séparer d’un cadeau qu’on me fait parce qu’il vient du cœur. Mon bureau et ma maison en sont d’ailleurs remplis ! J’avais gardé tous mes costumes, mes disques, des objets de mes grands-parents, des choses auxquelles je tenais, et j’ai tout perdu il y a 3 ans, lors des inondations à Paris. J’ai eu tellement du mal à m’en remettre qu’aujourd’hui, j’accorde moins d’importance aux souvenirs matériels.
- Vous venez d’évoquer les gens que vous aimez et qui ont disparu. Vous est-il arrivé de communiquer avec eux ?
- Je pense beaucoup aux gens qui m’étaient très proches, bien sûr, parce que j’aimerais qu’ils soient encore là. Certains sont partis trop tôt. Je pense souvent à mon père, mes grands-mères et à mes tantes. L’enfance qui revient, comme je vous le disais tout à l’heure, mais jamais, au grand jamais, je n’ai essayé de rentrer en contact avec eux.
- Certains pensent que nous sommes tous protégés par des anges gardiens. Seriez-vous plutôt tentée de croire que ce sont les personnes proches disparues qui veillent sur nous ?
- C’est une très jolie pensée qui aide certainement dans les moments difficiles. Je suis en effet croyante et j’ai appris à croire en Dieu tout le temps. Pas seulement lorsque j’en ai besoin. C’est vrai qu’on râle un peu quand il arrive de mauvaises choses mais c’est sûrement ainsi qu’elles doivent être…
- Avez-vous tendance à vous en remettre à Dieu pour expliquer les faits de votre vie que vous ne comprenez ou ne maîtrisez pas ?
- Cela dépend. De toutes façons, je baisse un peu les bras quand je me sens impuissante face à certains évènements. Si je sens que je peux faire quelque chose, je suis la première à me battre.
- Avez-vous en Dieu une confiance absolue ?
- Bien évidemment ! Il faut dire que lorsqu’on nous apprend au catéchisme que tout ce qui nous arrive est mérité, j’ai du mal à l’admettre quand je vois les proches mourir, les guerres, la famine et l’injustice dans le monde. C’est une contradiction à laquelle j’ai franchement du mal à m’habituer. On peut toujours se révolter, mais qu’est-ce que cela change ?…
- Cela veut dire que votre foi en Dieu est inattaquable ?
- Certainement pas puisqu’en plus, je ne pratique plus. Les propos et les comportements de certains curés m’ont dégoûtée et je ne vais plus aux messes.
- Y a-t-il encore un rêve que vous avez envie de réaliser ?
- C’est étonnant, mais tout le monde me pose cette question. Eh bien : aucun. Je ne projette jamais rien. Je me refuse à ça pour la simple raison qu’on ne peut jamais savoir si un rêve va se réaliser. Ne rien prévoir, c’est ne pas être déçue.
- Avoir des rêves, c’est avoir des buts. N’en avez-vous aucun ?
- Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce sont deux choses très différentes. Un but est un objectif précis que l’on veut atteindre et pour ce faire, on avance directement et de façon concrète. Un rêve est totalement impalpable. J’ai déjà tout le temps la tête dans les nuages, alors, imaginez si je l’ai aussi dans les rêves !
- Plus on parle avec vous, plus on vous découvre très prudente… Tout en ayant la tête dans les nuages, vous avez les pieds bien sur terre !
- Oui. C’est toute l’ambiguïté de ma personnalité. Je passe en effet mon temps à avoir la tête ailleurs. Ce que je pourrais cependant me reprocher, c’est d’être un peu trop raisonnable. C’est tout le problème des Cancer. C’est un signe très raisonnable. Non pas que cela me dérange, mais j’aimerais savoir de temps en temps m’accorder une folie. Par exemple, en plein milieu de la semaine, sans prévenir personne, prendre un petit sac et partir loin quelques jours. Mais j’en suis incapable ! Je n’oserais jamais faire cela. Trop de responsabilités et de gens me retiennent à Paris. Peut-être que je le ferai quand je serai vieille…
- Si vous aviez quelques mots pour vous définir ?
- Je n’en ai pas la moindre idée. Comme je ne passe pas mon temps à me regarder de l’intérieur, je réagis comme je suis, ce qui est parfois dangereux…
Véronique Aiache